Au soleil des pins noirs

L'orage gronde entre les pierres
les murs épais l'étouffent
sous la porte l'humide chemin
glisse des gouttes alignées
nous voici
hors
des
routes
naturelles
un étranger
traverse le village
légère
accélération
du temps
les signes légers de la sève
augurent le bourgeon
et les clochers ouverts au ciel
offrent immobiles
un indolent souffle
sonore
les orgues coupe des causses
bouches larges
embrassent la brume
persistante
le buis
effeuille
au ciel
un brun jaunâtre
souvenir de terre et du temps
l'élémentaire tissage
d'un bleu uni
le ciel sévère
contre en strates
les masses vivantes
ici l'herbe ponctuée
ici les cimes nues
[espace du désir]
partout le céleste rase la terre
couche parmi le multiple
des cailloux
un repli durci
de la mémoire
étoiles de la terre
les fleurs
blanches
du
prunelier
habitent
leur suspend
difficile de sentir
où prend corps la rupture
l'horizon
par lieux s'effondre
et les pierres mobiles
cherchent leurs contours
au gré des pas qui les dérangent
les chemins s'effilent
aux courbes des collines
lignes
de
calcaire
l'air
en strates
fendu
passe
la porte
des causses
et cherche
ta ligne médiane
au hasard montant de ton pas régulier
tu trouveras sous le bois
quelque lieu
gardant
le
repos
j'habite deux espaces
la jonte et le tarn
puisent en leur intime
un souvenir commun
le soir tombe avec l'orage
sur les gorges
un rocher s'y jette
dans l'épaisseur des brumes
passent les nuages
tempes rocher frôlé abrupte de l'air
les lignes tombent
multiples voix
nulle peur accompagne leur chute
nulle ligne maîtresse
dans le contour
nulle envie d'ailleurs
nul appétit de plus
calme
ton coeur
et vois comme tout
trouve douceur
dans cet absolu
de lumière
le jour tombe et le calme revient sur riesse
les pieds meurtris
par les pierres
et les chemins bordant
le vertige des parois
surplombant le rozier
contemple de près
la nature infinie
qui joue miniature
des verts des prairies
l'herbe s'allonge
la terre ici
porte l'assise
et
dans le blotti des vies clame la douceur
le soleil a déjà percé
des nuages
le couvert de la nuit
les ombres des rochers
rasent la prairie
peu à peu
ils se replient
en leur matière
des petits oiseaux jouent
entre les lignes de la barrière
traçant en courbes éparses
le bleuté de l'espace
de tes bras larges
et de tes mots perdus
dans le flot des preuves
tu reviens à toi
clore la boucle
un peu mourir
léger goût
âpre du vin
qui garde la gorge aride
malgré le verre plein
et la mémoire en peine
et l'espace inséquent
de nos blessures
plus loin l'aigoual sous la chaleur rayonnante
accouche en dômes successifs
l'élévation du marcheur
les courbes en vagues des prairies
accueillent
nos visages multiples
garde ton regard droit
et ton corps attentif
retiens encore
entre tes mains rapprochées
l'odeur de la terre et les nuits à venir